BATTICE ± 1950 – Plaque du Monument au Fort – détail du nombre de morts

À propos des victimes du Bâtiment I.

 

Lorsqu’ils évoquaient le drame du Bâtiment I, les anciens du Fort de Battice avaient coutume de parler de plus de 30 victimes. Un ouvrage rédigé par Joseph Franck, un habitant du pays de Herve parle même de 47 tués. (page 101)

Qu’en est-il exactement ?

Rappelons ce qui, aux yeux de certains, reste une hypothèse. Une bombe de fort calibre lancée par un Stuka aurait rebondi sur un obstacle antichar, aurait défoncé la grille de la poterne d’entrée et aurait explosé à l’intérieur du bloc, tuant bon nombre de soldats. Un incendie s’y serait déclaré et d’autres seraient morts par asphyxie. Il est à noter aussi que certains furent projetés jusqu’en bas de l’escalier menant à la galerie souterraine.

On n’y retrouva que 4 survivants dont deux moururent dans les jours qui suivirent.

La bombe ricochant sur un obstacle est la version la plus communément admise.

Quel effectif devait desservir un ouvrage comme le Bâtiment I ? Tous les ouvrages rédigés par les anciens du fort de Battice sont muets à ce propos. Force m’a été d’aller voir ailleurs.

Il y a au Fort d’Eben-Emael, un bloc — le 6 — qui est très semblable au B. I de Battice. On y trouve effectivement deux canons antichar de 60 mm, une mitrailleuse et un phare. La seule différence c’est qu’à Eben-Emael, il y a une cloche de guet tandis qu’à Battice, il faut assurer la défense de la poterne d’entrée. Pour le bloc 6 d’Eben-Emael, l’effectif est de 2 sous-officiers, un brigadier et 17 soldats, ce qui nous fait un total de 20 militaires. Il faudrait y ajouter 2 brigadiers et 5 soldats pour les mortiers Van Deuren, mais l’utilisation de ceux-ci étant devenue trop périlleuse, leurs servants n’avaient plus aucune raison de rester au bâtiment I et ce depuis le 17 mai!

Pour en savoir plus long, il convient de ne pas tenir compte de la plaque commémorative apposée sur le Bâtiment I. Elle compte 70 noms, mais au-dessus, on peut y lire « Tombés au combat ou en captivité ». En outre, il y a également une stèle qui elle porte les mots « De l’Est 36 des nôtres ne sont jamais revenus ». Il y a là matière à confusion. Faut-il ajouter les 36 au 70, ou au contraire soustraire.

Si l’on soustrait, on arrive au nombre de 34 ; 34 soldats tués lors des combats ou décédés quelques jours après.

C’est exactement le nombre que l’on trouve sur une première liste des morts établie en 1941.

Le Major Bovy, mort à l’aube du 10 mai, le soldat Kaivers gravement blessé lors d’une patrouille et décédé peu après, 5 hommes tués dans les abris cuirassés d’observation (3 à la Croix de Charneux et 2 à Manaihant), Remy tué au B V le dernier jour des combats, Michel blessé vraisemblablement au B V et décédé à Aix-la-Chapelle le 3 juin, Olivier et Pirnay, de la garnison de réserve, décédé l’un à Alleur le 11 mai, l’autre à Abbeville le 20 mai.

Ce dernier ne figure pas sur la liste établie en 1941, pas plus qu’il n’était sur la première stèle commémorative.

Quoi qu’il en soit restent les 24 noms de ceux qui sont morts au B I. Si l’on y ajoute les deux survivants, cela amène l’équipage à 26 personnes ce qui semble très vraisemblable. Il y avait en effet deux infirmiers sur place et peut-être d’autres soldats chargés de telle ou telle corvée.

Toutes les victimes ont été identifiées. Ce ne fut pas facile et dans le cas de l’une d’elles seul un trousseau de clés permit de la reconnaître.

Il y a au cimetière de Battice, un carré où reposent « Retrouvés au B I des restes de combattants ». Il ne s’agit pas tant s’en faut d’une fosse commune où l’on aurait enseveli des soldats non identifiés.

À ce propos, il est à signaler qu’au début des années 60, lors du ferraillement du fort, des anciens (Franz Chaussa et Jean Stembert) sont allés fouiller dans les gravats du B. I et y ont retrouvé un soulier et des guêtres dans lesquels il y avait encore les os d’un pied, tibia et péroné.

Cela dit, on peut valablement arrêter à 24 le nombre des tués du Bâtiment I. De toute façon, ça fait quand même 24 de trop.

Vingt-quatre braves, victimes d’une épouvantable malchance — cette bombe qui ricoche —, victimes aussi de l’impéritie des concepteurs de l’ouvrage qui auraient dû, c’était l’évidence même, construire une poterne en chicane comme au B V.

Guy Closset.

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